quelle est votre philosophie du Jeu ?

[photophore]

Dès que l'on se considère comme autre chose qu'un simple pousseur de bois il faut avoir une certaine conception du Jeu , une philosophie
Pour les uns , une partie est un combat , pour d'autres , dont moi , une controverse
Certains voient dans une victoire le résultat de l'exploitation de petits avantage , d'autres celui d'une volonté supérieure , d'autres enfin la réalisation d'une idée
Cela étant , quelle est ma philosophie ?
Elle est résumée par une des dernières paroles publiques de François Mitterrand : " Je crois aux forces de l'esprit"
Une partie plate , où tous les coups sont "naturels" , m'ennuie , meme si elle se conclut par le gain d'un pion et si la victoire technique s'ensuit
Aussi , là où je commence à m'intéresser , c'est quand un des joueurs joue un coup "hors du sens commun" , soit qu'il "ignore" une menace ,soit qu'il exécute le coup que son adversaire comptait empècher : s'il réussit , c'est que les "forces de l'esprit" étaient de son coté
Du moins , c'est comme ça dans les parties que j'aime , et que je m'efforce d'imiter
Et vous ?

[maximer]

la partie est un combat : la tension doit être à son comble et le résultat peut basculer dans un sens ou dans un autre à tout moment
aucune faute, aucune imprécision sinon c'est la défaite

[photophore]

OTB peut-etre , mais pas en JPC
Pour moi , ça reste une controverse sur la façon de mener une partie : gagner , c'est montrer qu'on avait raison
C'est assez voisin d'une joute d'avocats dans un prétoire , ou d'une discussion entre 2 rabbins sur un point de Talmud
Après quoi les avocats vont prendre ensemblee un verre à la buvette , et l'un des rabbins invite l'autre à déjeuner
En complément , je dirais qu'en matière de conduite de la partie , il y a 2 écoles : ceux qui veillent à n'introduire aucune faiblesse dans leur jeu , et ceux qui l'acceptent si cela doit en provoquer une plus grave chez l'adversaire ( et c'est là que je me place )

[Invité]

je dirais qu'en matière de conduite de la partie , il y a 2 écoles : ceux qui veillent à n'introduire aucune faiblesse dans leur jeu , et ceux qui l'acceptent si cela doit en provoquer une plus grave chez l'adversaire ( et c'est là que je me place )

du tac au tac "« Ne bougez aucun de vos pions et vous ne perdrez jamais la moindre partie. »"
Siegbert Tarrasch
Tout coup de pion affaiblit les cases qu'il contrôlait auparavant, tout joueur qui s'assoit en face d'un jeu d'échecs commence par brûler des vaisseaux sans être sûr qu'on va les lui rembourser.

[photophore]

C'est affaire de croyance , et je suis d'une autre chapelle
Je veux bien en discuter , mais alors laissons de coté les catéchismes

[photophore]

Tout dépend par qui on a été formé : moi c'était par Seneca , qui connaissait personnellement les protagonistes de l'école soviétique , et s'en inspirait dans son jeu et son enseignement
Je n'ai donc pas de raisons de vouer à Tarrasch un culte particulier

[admin]

Je n'ai donc pas de raisons de vouer à Tarrasch un culte particulier

Mais c'aurait pu être Stéphane Guillon ou Michel Serrault ou Jean Poiret ou Tartakover en train de déconner "Il vaut mieux sacrifier les pièces de l'adversaire !"
La phrase était amusante et signifie sérieusement que tout début de partie, solide ou romantique, commence nécessairement par se créer des faiblesses.
Pas de catéchisme Tarrasch chez moi et surtout pas d'esprit de lourdeur.

[photophore]

Dans certains débuts , comme la Svechnikov , il y a divergence entre les théoriciens , les uns disant que le doublement du pion f est un sérieux handicap , et d'autres , que j'approuve , que c'est largement compensé par la colonne g ouverte et la constitution d'une phalenge mobile e-f
C'est bien 2 écoles de pensée différentes

[admin]

C'est bien 2 écoles de pensée différentes

Pas vraiment d'accord mais c'est normal sur un stand de polémique positive.
Il y a aussi deux ailes, l'est et l'ouest, mais on ne décide pas d'être toujours à l'ouest. Ce sont les forces en présence qui décident.
Quant à dire ( je prends les devants ) qu'aimer attaquer à l'est est la preuve d'un jeu dynamique et aimer attaquer à l'ouest est la preuve d'un jeu plat, ce serait caricatural et en plus faux cf. les siciliennes qui visent b2 comme dans Fischer-Lecroq.
C'est comme les pions doublés sur c dans la Rossolimo, les noirs doivent jouer activement leurs pièces car leurs pions sont dévalués mais en choisissant 2...Cc6 ils peuvent aussi se trouver à défendre une meilleure structure de pions contre un jeu de gambit des blancs ou un jeu qui veut garder la paire de fous.
Rien n'est donc simple.

[photophore]

Je n'ai pas porté de jugement de valeur sur l'aile où se produit l'attaque : dans mes parties d'attaque , c'est assez équitablement réparti , à l'Est avec les B dans l'attaque Keres , mais à l'Ouest avec les N dans la Saemisch , que le R Blanc s'y trouve ou non comme contre Oger dans le MT Pinson

[Loujine]

Il n'y a pas de philosophie dans le jeu d' échecs. On s'engage dans une partie pour gagner. Pour gagner sa vie. Ou pour gagner du prestige auprès de ses amis.
La philosophie , elle est bien jolie , .
Mais aux échecs , ...
Les échecs sont vraiment l'anti philosophie même.

[photophore]

Libre à toi ! Mais , pour moi , une belle partie est une manifestation de la Vérité , comme une symphonie de Beetoven ou un théorème de Mathématiques
La victoire OTB libère de l'adrénaline , celle en JPC d'autres hormones ( peut-etre du cortisol ) dont l'effet est tout aussi intense

[Loujine]

"Une belle partie" .
Oui . Je suis sensible à la beauté d'une "belle partie".
Je joue pour la beauté du geste. Contre l'ordinateur. Je suis persuadé que les échecs sont condamnés : l 'informatique va tuer les échecs dans les 15 ans à venir. Les ouvertures, la puissance de calcul...
J'en profite , donc . Je profite de ces dernières années pour jouer contre mes potes , avec nos logiciels gratuits , avec ce qui nous reste de neurones .
Voilà pourquoi je joue aux échecs.

[photophore]

Méprise-t-on pour autant le géologue qui a mis au jour un gros filon en s'aidant d'un tractopelle ?

[Loujine]

D'un côté , le tractopelle , de l'autre , le géologue et sa truelle passionnée.

[Loujine]

..., comme une symphonie de Beethoven ou un théorème de Mathématiques...

je préfère Bach. Les Variations Diabelli sont pour moi le meilleur de Beethoven , mais rien ne se compare à JSB.

[Invité]

Tu as le dvd "Que ma joie demeure" ou tu as été voir le spectacle à Paris
(d'Alexandre Astier) ?

[Loujine]

non

[Invité]

[Loujine]

La bonhomie de Bach s'accorde mal avec les échecs . Nulle entourloupette chez Jean Sébastien.
Mozart ou Beethoven seraient plus échiquéens , plus humains , plus retors.

[Invité]

Beethoven retors ?
Sur la fin de sa vie il était devenu un peu difficile et bougon et sa gouvernante voulut le quitter.
"- Ne partez pas, ne partez pas ! Je vous en supplie, vous êtes ma muse !!
- Votre muse ?? Ah Ah Ah Ah !!"

[Loujine]

https://www.youtube.com/watch?v=c1czRiGYSYg
hmmm... mais j'ai un faible pour le " clavessin". Malgré tout.

[photophore]

Ma jeunesse a été bercée par les premières mesures de la "symphonie du destin" qui servait d'indicatif à la BBC (ça fait "v"en Morse )

[Loujine]

Radio Londres ?

[photophore]

"Et nos mornes matins en étaient différents" (Aragon )

[Loujine]

J'ai la chance de n'avoir pas connu cette époque .
Il y a 60 ans exactement , se jouait la plus grande et la pire des parties : Stalingrad : 800 000 "pions" sacrifiés .

Quand je joue aux échecs , j'ai toujours une pensée pour Stalingrad , Verdun , Waterloo ...
Les échecs sont "l'art de la guerre" .Un joueur d' échecs ne peut pas être pacifique. les échecs restent un art martial.
Kasparov disait " les échecs doivent détruire l' ego de l' adversaire".
La tactique et la stratégie sont les deux mamelles des échecs.
cela n'empêche pas que les échecs sont LA machine à tuer.

[admin]

Non tu dramatises.
Je n'aime pas perdre, comme tout un chacun, et il m'arrive aussi de gagner.
Dans le premier cas je n'ai pas l'impression d'avoir été tué.
Dans le second, pas l'impression d'avoir tué du monde.
Le sentiment de la victoire c'est un peu la satisfaction d'un mécano d'avoir bien réparé une mobylette.
Il faut en revenir à la notion d' O'Kelly de Galway. Jouer aux échecs c'est aller à l'opéra.

[photophore]

Quand on joue "à la table" , il y a un geste très symbolique à la fin d'une partie "décisive" (en cas de nulle , on se serre la main , sans plus ) , le vaincu couche son Roi , ce qui veut dire : " je m'incline " , c'est à dire "je suis convaincu" , car pour moi les Echecs sont une controverse , qui peut etre très vive , mais se termine dans la sérénité
On n'était pas d'accord sur un point de Théorie , et la partie a tranché : Amici Sumus

[admin]

Dans le premier cas je n'ai pas l'impression d'avoir été tué.

C'est rigolo ça ! Et si je dis "le souvenir" à la place de "l'impression " ça ne va pas non plus ! Il faudrait que je m'appelle René ! Je précise donc : la preuve que le mat ou l'abandon ne m'ont pas tué, moi, c'est que je pense encore à cette putain de défaite.
J'ai sans doute une blessure d'amour-propre mais on en guérit...avec l'espoir de revanche.

[Lecroq]

Je suis tout à fait d'accord avec la formulation de Claude .Lorsque l'adversaire abandonne (de plus en plus rarement) j'ai le sentiment qu'il a été convaincu que ma stratégie était la meilleure.
Si tous les affrontements pouvaient se régler devant l'échiquier cela ferait tout de même baucoup moins de morts...

[Indulgent]

Je suis tout à fait d'accord avec la formulation de Claude .Lorsque l'adversaire abandonne (de plus en plus rarement) j'ai le sentiment qu'il a été convaincu que ma stratégie était la meilleure.
Si tous les affrontements pouvaient se régler devant l'échiquier cela ferait tout de même baucoup moins de morts...

[photophore]

Un cas de figure intéressant , c'est la première fois que l'élève bat le Maitre : bien sur il est vexé , mais en meme temps c'est un succès pedagogique
Quand ça s'est produit avec Seneca , il m'a dit : " je savais que ça devait arriver , mais je me demandais quand"

[mikenas2001]

moi j'aime bien comprendre comment raisonne mon adversaire. Et anticiper ses réactions pour certains coups. Mais le plus dure et de trouver des varaiantes avec un jeux dynamique . Faire jouer les pièces ne ps simplement défendre sinon sa risque de figer sa position.
Je trouve que la puissance d'un coup peut avoir plusieur sens: renforcer attaquer défendre et même avoir 2 sens différents
Avancer sans jamais être pouvoir toucher là et mon art!

[photophore]

La différence de conception tient peut-etre à une différence de dosage hormonal : il y a ceux qui marchent à l'adrénaline et à la testostérone ( mais ils jouent plutot à la table ) , et ceux qui marchent au cortisol (l'hormone de la satifaction )
Je m'en suis aperçu à l'occasion d'un traitement de 3 jours pour une affection bénigne : pendant ces 3 jours je ressentais une euphorie telle que j'ai craint que mon jugement soit affecté , et j'ai arreté de jouer le temps du traitement
Je ressens le meme effet en moins intense quand je gagne une partie

[Loujine]

"je ressentais une euphorie telle que j'ai craint que mon jugement soit affecté "
diantre !
J'aimerai bien connaître cette situation.

[Loujine]

"je ressentais une euphorie telle que j'ai craint que mon jugement soit affecté "
diantre !
Tu as été victime d'une intoxication cannabique..

[photophore]

Pour cela , il eut fallu que je fumasse parfois un pétard , ce qui n'est pas le cas

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